土耳其、叙利亚等地伊斯兰教密宗苏非教唱诗典礼。
苏非教由十三世纪波斯大诗人鲁米Rumi创立,修行者叫做derviche tourneur,即旋转的苦行僧。他们头顶的帽子象征自我的墓碑,身上的白裙象征给自我服丧,黑袍象征坟墓,双手交叉放在胸前象征神性的合一。在音乐和诗歌中旋转,渐渐张开双臂,抛弃自我,抛弃凡尘,与上帝沟通。
Mevlevi Ayini-1.Selam
la conscience de l’imbrication de l’ici et de l’ailleurs
Stabat Mater Dolorosa, Hommage chrétien et musulman à
Marie
Création de Julien Jâlal Eddine Weiss et l’Ensemble
Al-Kindî(Syrie, Egypte, Turquie, etc.),
avec
Tropos, chœur byzantin d’Athènes(Grèce),
et
Chorale des Mushiddin de la Confrérie Qaderi d’Alep,
et
2 Derviches tourneurs de Damas
Sur la gauche de la scène se disposent quelques pupitres
et partitions, à droite, un grand tapis persan. Dans ce théâtre ayant jadis
accueilli le grand maitre pakistanais de Qawwali, Nusrat Fateh Ali Khan avec le
public en pèlerinage, on peut aussi admirer une salle décorée avec des objets
personnels et photos de Sarah Bernhardt. Quelle surprise nous réserve cette
face-à-face, ou plutôt côte-à-côte et main-dans-la-main de l’Orient et l’Occident ?
Par quel point de convergence ?
Les 15 choristes de Tropos,
prêtres chantres orthodoxes grecs en soutane noir montent d’abord sur scène en
file indienne et se mettent en 2 rangs : 4 derrière et les 11 autres
devant. A ma grande surprise car, à la différence des chants liturgiques polyphoniques
tels qu’on a l’habitude d’entendre en Europe, avec le geste du chef de chœur,
une mélodie de couleur byzantine sinon arabo-musulmane se lève en unissant
toutes les voix, seuls les 4 chantres du 2e rang chantent, aussi en
unisson, une basse continue presque invariable de quelques notes.
Le chant liturgique byzantin, une tradition chrétienne
qui a connu son apogée sous l’empire ottoman, a vécu une rupture en Grèce. Il n’est
plus présent dans la musique populaire et ne survit que dans la musique savante
qui a su gardé la tradition modale. Cependant, dans le monde arabo-musulman,
cette tradition monodique se perpétue et reste vivace aussi bien dans les
milieux populaires qu’ecclésiastiques.
La voix(comme si l’on parlait d’une seule voix !) de
ce chœur, homogène, éclatante, avec la simplicité et la force extraordinaire du
début du christianisme, nous ramène directement dans IVe siècle où les pères
ont composé ces chants.
La musique ottomane qui a longuement nourri la musique
byzantine, fait son apparition sur scène après l’ambiance recueillie des
chantres grecs. Vêtus de blanc et de vert, les musiciens inspirés s’installent
avec leurs instruments : qânun, oud, ney, tanbur ottoman, riqq. La voix
perçante du maître de la Confrérie Qaderi d’Alep, Sheikh Habboush, guide cet
ensemble riche en sonorités et en rythme, en lui donnant une pulsation exceptionnelle.
La salle commence à se chauffer.
Lentement, les 2 derviches tourneurs, alors drapés dans
un grand manteau sombre, se lèvent et se dirigent vers Sheikh Habboush. D’un
signe de tête, les mains croisées sur la poitrine, geste qui signifie l’unité
divine, ils se saluent et saluent le maître. La musique classique arabe
continue dans son élan, mais le cœur et le souffle du public sont retenus par les
mouvements à la fois majestueux et recueillis des derviches tourneurs qui,
après avoir déposé le manteau, se posent au devant de la scène dans leur
costume blanc.
Je ne me souviens plus quand le public a commencé à
frapper les mains avec le rythme des percussions. Une chose est sûre : les
2 figures blanches, disciples de Rumi, dans l’extase qui les fait détacher de
leur ego(couleur blanche de leur robe et chapeau blanc signifient le deuil de
leur ego), ont su emporter nos âmes dans une tornade, une ivresse divine de la
musique et de la danse.
Les choristes grecs sont montés sur scène à nouveau. Le contraste
entre la couleur noire de leur soutane et les couleurs vives des musiciens
arabes annonce une observation et une écoute réciproques, puis un dialogue.
Selon Julien Weiss, les liens musicaux entre la tradition
byzantine grecque d’Orient et la tradition musulmane demeurent dans le symbolique
de la Vierge Marie. N’oublions pas que Jésus et Marie font partie des
personnages saints de l’Islam. D’où vient ce projet créé à l’occasion du
Festival de Fès.
La salle devient bouillonnante, on tape des mains. Beaucoup
ont dû reconnaître du rythme familier ; d’autres sont tout simplement
enchantés. La musique a retrouvé sa fonction initiale : relier les hommes
entre eux et avec quelque-chose au-dessus de nous.
« Il s’agit bien d’arriver à un moment à une
forme de syncrétisme, une vraie rencontre, une superposition, une
interpénétration, que sais-je, un vrai dialogue, explique Julien Weiss. L’idée qui m’a toujours traversé, c’est de
présenter et d’interpréter des traditions religieuses, et de les faire
descendre dans la sphère du profane afin de les faire apprécier comme un art
transcendantal, précise-t-il. Il s’agit
de présenter des esthétiques musicales à travers l’idée positive d’un
personnage extraordinaire qu’est la Vierge Marie. La Vierge Marie est un thème
récurrent dans notre civilisation, et dans le monde musulman. L’idée, c’est
aussi de montrer que l’islam est une tradition religieuse qui fait partie d’un
fonds commun avec le monde. L’idée, c’est aussi de pacifier le débat entre les
religions. En fait, ce projet résume mon travail avec Al-Kindî depuis trente
ans : essayer de montrer la richesse, la splendeur de la culture
arabo-musulmane. »